Comment raisonnent les scientifiques ? En résumé, s'il faut abandonner l'idée qu'il existe des observations parfaitement neutres qui jouissent d'une autorité parfaite sur les théories, il reste raisonnable de penser qu'on parvient finalement à stabiliser nos observations par un jeu d'essai et d'erreur.
De même quand on place des trèfles rouges, ils croient les voir marrons ou pourpres. Nous allons voir qu'elle n'a vraiment rien d'évident. La technique nous permet à la fois d'étendre le champ de ce qui est observable, c'est à dire de découvrir de nouveaux phénomènes, et d'offrir de nouvelles perspectives ou de nouveaux accès sur des phénomènes ou objets déjà connus (comme les os). Mais aujourd'hui ? Dans cet article nous allons commencer par nous interroger sur cette notion idéal d'observation directe. − Science d'observation. Les intérêts po...Un blog de vulgarisation pour la philosophie des sciences S'il est vrai que dans certains cas une théorie bien établie peut faire autorité sur nos expériences (par exemple, lors de l'expérience OPERA, des signaux plus rapides que la lumière ont été mesurés, mais on a poussé l'investigation pour voir d'où venait l'erreur, tant la théorie de la relativité est bien établie), il est certain que certaines observations ne peuvent être accommodées avec les théories : si, par exemple, les planètes avaient des durées de rotation autour du soleil incohérentes avec la théorie de Newton. Ainsi pour Bogen et Woodward, l'idée que les théories scientifiques puissent avoir pour rôle d'expliquer les données observées est illusoire : les données dépendent de multiples facteurs contextuels, propre aux instruments particuliers utilisés, à leur sensibilité, ou au lieu précis de l'expérience (le taux d'humidité dans la pièce, une autoroute à proximité du laboratoire qui perturbe les instruments). Qu'est-ce qui fait qu'on accepte ou rejette un théorie en science ? Ce signe n'existe pas dans les jeux de carte classiques, et il se trouve que quand les cartes sont montrées très rapidement aux sujets, ceux-ci ne reportent pas avoir vu des cœurs noirs, mais des piques. Ceux-ci sont connus à l'issue d'un traitement des données : les données sont sélectionnées (on élimine les artefact ou le bruit), corrigées (on tient compte de perturbations de l'environnement), interprétées (on tient compte du fait que la mesure est indirecte). Mais tous ces aspects n'ont que peu d'intérêt scientifique : ils visent seulement à s'assurer que nos observations sont fiables. Ainsi Lavoisier et Priestley savaient se mettre d'accord sur leurs observations, comme la durée après laquelle une souris meurt dans un récipient fermé dans lequel se trouve une bougie, même s'ils défendaient des théories différentes (Priestley parlait de phlogiston, et Lavoisier d'oxygène pour expliquer la même observation). Il n'existe donc pas de pur donné qui puisse servir de base à la connaissance. Tout ce qui concerne les bonnes conditions d'observation relève de connaissances qui ne sont pas directement données dans l'observation, mais qui sont issues d'un apprentissage : je sais, par expérience, que certaines conditions sont trompeuses. Le problème philosophique que cela pose est le suivant : comment donc nos observations scientifiques peuvent-elles réfuter ou confirmer nos théories si elles dépendent à ce point des théories elle-mêmes ? On peut en général s'assurer de la robustesse des observations indépendamment de nos théories. Finalement la question pourrait être : où s'arrête l'observation, et où s'arrête la théorie ? Quand une équipe du CERN affirme avoir observé le boson de Higgs, il ne s'agit certainement pas d'une observation directe : la complexité des appareillages et des traitements informatiques est telle que, finalement, ce ne sont jamais que des rapports produits par des ordinateurs que nous observons directement, et finalement, l'observation au sens originel, à l’œil nu, ne joue qu'un rôle minime, en bout de chaîne, dans les expériences du CERN. Jusqu'ici nous avons parlé de l'observation en général. Est-ce à dire que l'on ne trouve jamais ce que l'on cherche, et que, finalement, les expériences ne confirment rien du tout ? Ou encore, je peux voir un outil quelconque là où un artisan plus spécialisé que moi verra une scie à métaux.